Biographie trafiquée

par GP

Je ne me rappelle pas de mon premier souvenir. Les fois où je m’arrête pour y réfléchir, je ne parviens qu’à me commémorer quelques anecdotes éclectiques survenues à partir de plus ou moins 5 ans d’âge.

Je me rappelle avoir eu une gerboise, que j’ai ingénieusement nommée Coco d’après la perruche familiale du même nom.

Je me rappelle vouloir sortir Coco la gerboise de sa cage et qu’il luttait contre l’idée de se faire attraper. Je l’avais saisi par le seul endroit auquel j’avais accès : sa queue. Un centimètre de celle-ci m’était resté entre les doigts. Une petite boule de chair et de poils gisait entre mon pouce et mon index tandis que Coco, saigné, laissait dernière lui, dans le bran de scie, un fil d’Ariane.

Quelques autres souvenirs de mon enfance restent assez clairs. Toutefois, ils sont durs à départir des faux. Il semblerait qu’avec le temps, ma mémoire ait tamponné ce que j’ai lu, vu et vécu en histoires erronées.

Je tronque la réalité. Je l’étire. L’enjolive. La dramatise. Je poétise la vérité. La rend mienne. Ce n’est que confronté à d’autres acteurs d’une même chronique que je réalise l’ampleur des altérations que je façonne. Souvent, j’acquiesce, pour qu’ils se taisent ; pour que je puisse conserver ma version falsifiée des faits. Plus belle et plus facile à trimballer.

 

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