Smarties.

par GP

J’avais 6 ans.
Un jour de fin de semaine, mon père invite ma mère, mon frère et moi a allés manger une crème glacée.
On embarque dans la voiture.  On roule.
Après un moment déjà, après avoir passé plus d’une crèmerie sans que je m’en aperçoive, mon père m’indique que l’on va arrêter quelques instants chez une de ses copines à qui il veut me présenter.  Cette soi-disant copine fabriquait des poupées.  Mon père croyait que j’apprécierais, puisque j’appréciais les poupées.
Je soupire.  Je veux mon cornet.
En banlieue, en quartier résidentiel, on stoppe.  On débarque de la voiture.
On sonne.
Une madame répond.  Elle tricote avec ses mots, tente de combler le vide et de disperser le malaise.  C’est curieux.  Tout le monde est tendu.  Sauf moi.
Son mari se fait voir derrière elle, la silhouette coincée dans le cadre de porte,  avec un bébé chien aux bras.

Depuis que j’avais maîtrisé la faculté de la parole, je criais haut et fort, à qui voulait bien l’entendre, que j’étais passionnée des dalmatiens.  J’en voulais un.  J’en voulais un.  J’en voulais un.

En banlieue, en quartier résidentiel, on stoppe.  On débarque de la voiture.
On sonne.
Une madame répond.  Elle tricote avec ses mots, tente de combler le vide et de disperser le malaise.  C’est curieux.  Tout le monde est tendu.  Sauf moi.
Son mari se fait voir derrière elle, la silhouette coincée dans le cadre de porte,  avec un bébé dalmatien aux bras.

Ce serait Smarties.

J’ai fixé le chien alors que tous avaient les yeux rivés sur moi.
Le mari contourna sa conjointe, et me posa l’enfant canin aux creux de mes coudes.
J’ai fixé le chien.  J’ai fixé mon père.
Mon père hocha.
C’était Smarties.  C’était mon chien.  C’était mon dalmatien.

J’ai déposé le chien au sol.  J’ai accosté mon paternel.  Je l’ai remercié.  Et j’ai pleuré.  J’ai pleuré de joie, pour la première fois.

Smarties s’est fait euthanasiée ce soir.
J’ai pleuré.  Comme au premier jour.  J’ai pleuré, mais de ne pas pleurer de joie.

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